Cour administrative - prononcé de trois arrêts dans trois affaires relatives au PAG de la commune de Fischbach

Trois affaires relatives au PAG de la commune de Fischbach

38895C – 39293C et 39294C du rôle -  Arrêts du 13 juillet 2017

La Cour administrative vient de prononcer, à l’audience publique du 13 juillet 2017, trois arrêts répondant à trois recours de la commune de Fischbach contre trois décisions ministérielles de refus d’approbation émanant respectivement du ministre de l’Environnement et du ministre de l’Intérieur.

La commune de Fischbach n’avait jamais disposé d’un plan d’aménagement général (PAG) ayant parcouru toutes les étapes de l’ancienne procédure d’adoption et d’approbation des PAG. Elle a initié un projet de refonte de son PAG qu’elle a fait adopter par son conseil communal par délibération du 11 juillet 2016.

Par décision du 21 septembre 2016, le ministre de l’Environnement a refusé d’approuver ce projet de refonte du PAG.

Le premier recours toisé par la Cour aujourd’hui, inscrit sous le numéro 38895C du rôle, est dirigé contre ce refus d’approbation du ministre de l’Environnement.

Par décisions du 21 décembre 2016, le ministre de l’Intérieur a refusé d’approuver respectivement la même délibération du 11 juillet 2016 portant adoption du projet de refonte du PAG, ainsi qu’une délibération du même jour du même conseil communal portant adoption du plan d’aménagement particulier quartier existant (PAP-QE).

Par deux recours introduits le 21 mars 2017, sous les numéros 39293C et 39294C du rôle, la commune de Fischbach a également attaqué ces deux refus d’approbation.

Il résulte d’une combinaison de la loi communale modifiée et de la loi portant organisation des juridictions de l’ordre administratif que les recours introduits par une commune contre une décision de refus de son autorité de tutelle (ici les ministres de l’Intérieur et de l’Environnement) sont portés directement devant la Cour administrative.

La Cour administrative a profité du décalage dans le temps des deux séries de recours pour faire plaider d’abord celui dirigé contre le refus d’approbation du ministre de l’Environnement à l’audience du 28 mars 2017. Là-dessus une visite des lieux a eu lieu en la commune de Fischbach avec les responsables communaux et étatiques du ministre de l’Environnement. Tous les sites litigieux ont été visités. Après cette visite des lieux, les parties communale et étatique se sont mises ensemble et ont trouvé certains points d’entente, tandis que d’autres points critiqués par le ministre de l’Environnement n’ont pas connu de rapprochement entre les deux parties.

Les trois affaires ont de la sorte été plaidées à l’audience publique du 27 juin 2017. Les arrêts interviennent le 13 juillet 2017. Au-delà du résultat concret découlant de ces arrêts pour le PAG de Fischbach, la Cour a eu l’occasion de rappeler, sinon de fixer plusieurs principes d’une importance dépassant le cadre de la présente affaire.

La Cour a d’abord mis l’accent sur le principe de l’autonomie communale qui doit être regardé comme étant la règle générale, tandis que la tutelle étatique est à voir comme disposition d’exception, en application à la fois de la Charte européenne de l’autonomie locale signée à Strasbourg le 15 octobre 1985 et de l’article 107 de la Constitution.

Elle a encore confirmé, également face à un ancien PAG n’ayant pas parcouru toute la procédure de l’époque, le principe suivant lequel la compétence du ministre de l’Environnement en tant qu’autorité tutélaire n’est pas générale, mais se limite aux parties du territoire communal qui, à travers une modification du PAG, connaissent une modification de la délimitation de la zone verte. Si un terrain passe de la zone verte en zone constructible ou vice versa, le ministre de l’Environnement agit en tant qu’autorité de tutelle et contrôle la légalité de la délibération communale essentiellement par rapport aux principes se dégageant de la loi du 19 janvier 2004 sur la protection de la nature et des ressources naturelles et plus particulièrement ses objectifs découlant de l’article 1er.

La Cour a eu l’occasion de souligner la difficulté en pratique de délimiter aujourd’hui de manière retraçable les limites du périmètre d’agglomération, telles que découlant d’anciens PAG en raison de la difficulté d’accéder aux documents pertinents, dont plus particulièrement les parties graphiques.

Par contre, le ministre de l’Intérieur statue dans le cadre d’une tutelle d’ordre général et contrôle la légalité de la délibération communale portant adoption du projet de refonte du PAG de même que sa conformité à l’intérêt général dans le contexte des objectifs fixés par l’article 2 de la loi du 19 juillet 2004.

Succinctement, la Cour a retenu que si, en substance, la protection de l’environnement est de l’apanage du ministre de l’Environnement, les questions d’urbanisme sont de l’apanage du ministre de l’Intérieur.

La Cour a encore mis en exergue l’extrême difficulté pour une commune de mettre sur rail un projet de refonte de manière valable compte tenu d’une série d’inconnues tenant à l’absence de plans sectoriels devant néanmoins un jour conditionner la réglementation communale d’urbanisme, de même qu’à l’absence pour les communes non encore fusionnées d’une vision certaine d’avenir qui dépend précisément du projet de fusion qu’elles vont le cas échéant rejoindre ou pas.

La Cour a souligné le lien éminent entre les structures communales résultant notamment des fusions envisagées et l’aménagement du territoire communal. Elle a également rappelé que le projet de refonte du PAG de la commune de Fischbach avait été commencé à un moment où une fusion avec les communes de Nommern et de Larochette était en vue. Or, cette fusion n’a pas abouti suite au résultat négatif du référendum afférent.

La Cour a également mis l’accent sur les bienfaits de la visite des lieux par elle instaurée en ce qu’elle a permis non seulement d’avancer dans la détermination de la consistance de la réglementation communale d’urbanisme antérieure, mais surtout à rapprocher les autorités communales et étatiques en termes de communication et d’échanges de vues. Il y est apparu que les autorités étatiques partaient de ce que la commune, en n’ayant pas directement communiqué avec les services du ministre de l’Environnement, mais uniquement par l’entremise d’un bureau d’études, avait donné lieu à des malentendus certains. La Cour a pu rétablir le dialogue entre parties et le fruit concret qui en est résulté consiste d’abord dans plusieurs rapprochements des parties qui ont emporté que des solutions concordantes correspondant au cadre légal ont pu être trouvées de l’accord des parties et n’ont pas dû être imposées par décision de justice.

La Cour a encore retenu que le plan directeur de l’aménagement du territoire de 2003 n’a pas de valeur normative et n’a pas pu servir au ministre de l’Intérieur en tant que motif de refus d’approbation valable.

Elle a encore défini le périmètre d’agglomération d’une localité comme s’entendant en tant que plaque de territoire continue et essentiellement concentrique, de sorte qu’elle a confirmé le refus ministériel par rapport à la mise en place d’îlots d’urbanisation non connectés ou déconnectés par rapport au périmètre d’agglomération de la localité dont ils dépendent par ailleurs. La Cour a cependant admis une exception concernant l’entité de Schiltzbierg dont le tissu continu a été jugé suffisant pour justifier la mise en place d’une zone mixte rurale comportant un périmètre d’agglomération autonome.

Le reproche du ministre de l’Environnement d’une consommation trop élevée de terrains par leur inclusion dans le périmètre d’agglomération a été, en grande partie, désamorcé. Pour les extensions les plus importantes du périmètre d’agglomération à Schoos, un accord a pu être trouvé entre parties conditionné par la décision de la Cour de reconnaître la validité de servitudes d’intégration paysagère. La Cour a décidé que même si pareilles servitudes pouvaient constituer une charge certaine pour le propriétaire, il fallait, dans le cadre de la problématique lui soumise, les voir de manière globale en tant qu’outil rendant possible le passage de terrains de la zone verte dans une zone urbanisée à travers un lotissement afférent et que dans cette vue globale la charge de la servitude était largement compensée par l’augmentation de valeur du terrain anciennement non constructible, devenu terrain constructible.

Concernant le point litigieux majeur de la constructibilité des terrains situés en glacis au Sud du campus scolaire et de la nouvelle maison relais à Angelsbierg, la Cour a retenu qu’en l’état, le refus d’approbation du ministre de l’Environnement suivi par celui du ministre de l’Intérieur se justifie, mais que, compte tenu également de servitudes d’intégration paysagère valables à prévoir, une urbanisation devait néanmoins pouvoir être envisagée à moyen terme, vu que les terrains en question revêtaient une valeur urbanistique élevée en raison de la complémentarité des fonctions d’habitation, de garde d’enfants et d’accueil scolaire proches, ainsi que d’activités culturelles et sportives afférentes proches, ensemble l’évitement pour les futures habitants de tout transport scolaire et parascolaire. La Cour a précisé que ce refus d’approbation ne couvrait pas les terrains à l’Ouest du côté latéral de la maison relais.

En conclusion globale, les recours communaux ont été déclarés partiellement fondés et le dossier a été renvoyé devant les autorités communales en prosécution de cause.

Les réclamations de membres du public non encore aplanies par les autorités communales avaient été déclarées sans objet par le ministre. En renvoyant le dossier devant les autorités communales, la Cour a attribué à la commune l’obligation d’informer les auteurs des réclamations et d’en tenir compte à titre d’objections assimilées sans qu’une nouvelle initiative ni démarche des ci-avant réclamants n’est nécessaire, le tout dans le respect des droits de la défense et de la collaboration procédurale des administrés.

Dans les trois arrêts, la Cour a fait masse des dépens, c’est-à-dire en gros des frais de justice, et condamné la commune de Fischbach et l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg, chacun à la moitié de ceux-ci.

Ces trois arrêts sont définitifs, dès le jour de leur prononcé, la Cour administrative étant la juridiction suprême de l’ordre administratif en vertu de l’article 95bis de la Constitution.

 

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